Pourquoi jouer à Amy est-elle la seule façon de pouvoir prétendre avoir vécu une expérience de survival horror ?
Suite à la commercialisation de Amy sur le XBLA et le PSN, le jeu défraya la chronique en générant tout un tas de faits divers tous plus glauques les uns que les autres.
Ainsi, deux jours après sa mise en vente, un jeune homme de 18 ans habitant Lilles tua de 24 coups de couteaux son père dans son sommeil suite à un différend. Il se défendit en expliquant au juge que son père avait déclaré qu’Amy était ratée et que le prix de 10€ était excessif. Immédiatement, le juge remit le jeune homme en liberté, déclarant que proférer ce genre d’inepties était inadmissible et qu’il avait fait là une brillante preuve de civisme par cet acte qu’il qualifia d’‘’Admirable’’. Le jeune homme fut tout de même condamné à payer une amende de 3000€ pour s’être arrêté à seulement 24 coups de couteaux.
Lorsque des joueurs affirment avec conviction que le genre survival horror est mort, dans un premier temps je rigole en me roulant par terre, ensuite je me relève en époussetant mes vêtements, puis je leur dis de jouer à Amy.
Seulement voilà, on a beau être fanboy, on n’en est pas moins exigeant pour autant. Je vais donc essayer de séparer le positif du négatif pour ce jeu car il y a vraiment énormément de choses à dire dessus, en bien comme en mal.
Le pitch :
L'histoire prend place en décembre 2034. Vous incarnez Lana, un scientifique également nounou à ses heures car elle s’occupe d’Amy, une jeune autiste de 8 ans possédant d‘étranges pouvoirs psychiques. Ce fragile duo devra faire face à une étrange épidémie transformant la population en une horde sauvage extrêmement violente.
Les points forts du jeu :
L’ambiance
Cela faisait longtemps que l’on n’avait pas eu une ambiance aussi pesante dans un jeu. Si des titres comme Dead Space tirent leur épingle du jeu en terme d’horreur et d’arrêts cardiaques de joueurs, Amy a une ambiance qui rappellera quelques souvenirs assez savoureux aux joueurs ayant connu les premiers Silent Hill. Vous ne possédez dans ce jeu pas grand chose pour vous défendre (au mieux, un bâton). Il vous est souvent nécessaire de vous cacher sous des tables ou bien dans des placards à la façon d’un Siren Blood Curse, et d’utiliser les éléments du décor pour feinter les ennemis et jouer au chat et à la souris.
L’originalité du gameplay
Si nous avons déjà eu droit à des systèmes d’escorte dans du survival (RE4 pour n’en citer qu’un), le système que nous retrouvons ici est très intéressant car si vous devez protéger Amy, votre survie dépend également de sa présence auprès de vous.
Si vous vous éloignez trop longtemps de celle-ci, vous succombez peu à peu à la malédiction qui frappe les humains et vous vous transformez en créature démoniaque, ce qui se traduit par un game over.
Amy étant une fillette, elle prendra souvent peur et il faudra lui donner constamment la main en gardant enfoncée la touche R1. Ce petit détail est tout bête mais on sent que l’on est légèrement handicapé pour manipuler la manette en faisant cela, ce qui rend le fait de lui donner la main assez immersif.
Et c’est là que tout se complique, les level designers nous ayant concocté de nombreux puzzles qui nécessitent souvent d’envoyer Amy en éclaireur pour actionner une porte, pirater un ordinateur, ou tout simplement faire le pot de fleur en sûreté pendant que vous jouez les acrobates sur des corniches au-dessus d’un entrepôt en flamme.
Amy sera rapidement capable de dessiner des glyphes pour utiliser des capacités spéciales qui prennent la forme de sortilèges. Zone de Silence, Onde de choc, il faudra utiliser ces sorts avec parcimonie, sous peine de devoir faire de fastidieux allers-retours pour qu’Amy puisse “recharger” son stock de sorts.
Une réelle expérience de survival
Dans Amy : pas d’armes à feu. Au mieux, vous pourrez vous défendre avec un bâton qui peut se rompre à tout moment. Il est souvent nécessaire de vous dissimuler et de vous déplacer le plus lentement possible pour éviter de révéler votre présence aux nombreuses créatures.
Courir au travers de la mêlée ne vous sera pas toujours salutaire si vous ne trouvez pas une cachette où vous dissimuler aux détours d’un couloir. En effet, les ennemis sont féroces et vous tuent dans le meilleur des cas en quatre coups (certains vous tuant en un seul). Le jeu est cruel et vous demande de la patience. Vous êtes une femme en jupe et en talon, pas un membre des S.T.A.R.S..
Par moment, il vous sera même nécessaire de laisser Amy derrière vous, pour laisser lentement opérer votre transformation et vous mêler aux monstres qui vous prennent alors pour un de leurs semblables. Mais attention, si vous tardez trop à revenir prêt d’Amy, les conséquences seront funestes.
Attaquons-nous maintenant à la partie qui fâche...
Les points faibles du jeu :
Ils sont malheureusement nombreux et certains d’entre eux seront rédhibitoires pour de nombreux joueurs.
Animation
Mon dieu que c’est laid ! Les graphismes sont bien au rendez-vous et le rendu est vraiment à la hauteur de la bande annonce, mais dès que l’on commence à jouer, ça saccade au moindre mouvement de caméra. On croirait que le moteur du jeu peine à tout afficher en même temps alors que les détails qui composent les décors sont très loin de pousser nos machines dans leurs retranchements.
Un splendide travail complètement gaché par un moteur graphique aux fraises.
Gameplay
Pour trouver un gameplay plus crispant que Amy, il faudra que vous ressortiez votre GameCube et que vous vous refassiez une partie de Resident Evil Zero.
Malgré le nombre limité d’action que vous avez la possibilité d’entreprendre (courir, frapper, appeler Amy, utiliser un objet, etc.) vous devrez souvent combiner plusieurs boutons, ce qui est loin d’être pratique.
Par exemple : sur PS3, la bouton carré ne sert pas, mais pour frapper avec votre bâton, il vous faudra garder la touche L2 enfoncée et appuyer sur carré. Les commandes sont loin d’être intuitives et même en étant arrivé au dernier chapitre du jeu, il m’arrivait encore de mettre le jeu sur pause pour aller regarder le menu des commandes pour me rafraîchir la mémoire.
De plus, certains gestes des plus élémentaires sont impossibles à réaliser et font plonger dans une totale perplexité : si Lana descend d’une caisse seule, il lui est impossible de se faire suivre par Amy ou bien de l’aider à descendre. Pour qu’Amy vous suive, il faut lui tenir la main au moment où vous appuyez sur X pour descendre de la caisse. En faisant celà, une cut-scène se déclenche montrant votre personnage descendre seul de la caisse, puis aider Amy à descendre par la suite. Ce genre de situation peu virer au cauchemard quand Amy vous lache la main après avoir frôlé un mur un peu trop fort, juste avant que vous n'appuyez sur X. Vous descendez alors de la caisse sans Amy, vous remontez, reprennez la main d'Amy, redescendez en prenant bien soin de soigner votre angle d'attaque pour que cette petite peste ne vous refasse pas le coup une seconde fois (elle le refait pourtant souvent). Chaque mouvement de ce type entraînant une cut scene, les refaires plusieurs fois d'affilé represante un afligeant spectacle qui n'a comme seul intérêt que de ralonger la durée de vie du titre d'une manière très déplaisante.
Et des exemples comme ça, il y en a un nombre pas croyable, ce qui gâche énormément l’expérience de jeu.
L’I.A.
Cette dernière nous permet de voyager dans le temps en faisant un bon de quelques années en arrière dans l’histoire du jeu vidéo. Vous pourrez donc vous amuser à mettre à l’épreuve la vigilance des ennemis qui montent la garde, ces derniers ne réagissant pas à votre présence du moment que vous restez dans leur dos.
D’autres ennemis qui se nourrissent de cadavres dans des bureaux ne réagissent pas non plus à votre présence derrière une immense vitrine transparente, ceux-ci étant “programmés” pour vous attaquer uniquement au moment où vous brisez cette dernière avec votre fidèle bâton.
On pourrait penser que ce sont les perceptions des monstres qui sont différentes des vôtres, mais les militaires qui tirent à vue sur tout ce qui bouge ne sont pas gâtés non plus. Ces derniers vous tirent dessus si vous passez devant le bureau où ils se trouvent, mais n’en sortiront jamais, même si vous vous amusez a faire des dizaines de passages. En revanche, si vous faites sonner un téléphone plus loin dans le couloir, ils quittent leur position pour démarrer une ronde afin de trouver la personne qui a fait du bruit dans le couloir.
Vous l’aurez compris, ce jeu est riche en script, ce qui coupe court à toute créativité dans l’approche des différentes situations qui sont proposées.
De plus, les personnages se retrouvent souvent à courir contre un grillage, un mur ou un poteau sans chercher à le contourner. Ça peut aider quand il s’agit d’un ennemi, mais quand il s’agit d’Amy qui se retrouve dans l’incapacité de vous rejoindre, c’est tout de suite plus embêtant.
Durée de vie
Trop courte. 6h tout au plus en mode normal, le mode difficile ne rallongeant la durée de vie que de par vos innombrables morts et reprises en début de chapitre, souvent dues aux raisons citées plus haut.
Pour conclure, je dirais que malgré ses nombreux défauts, Amy est une très bonne expérience de survival qui aurait mérité d’être mieux peaufinée. Un coup d’essai donc mais pas un coup d’épée dans l’eau pour autant. Le jeu fourmille de bonnes idées et pêche surtout au niveau de sa réalisation, de nombreux bugs venant s’ajouter à la liste de défauts énumérés plus haut.
Trois détails viennent néanmoins nuancer ce constat :
1- Le jeu ne coûte que 10€. Et même si pour ce prix là, on peut avoir un bundle Lost Planet 2 & Resident Evil 5, cela reste un prix raisonnable pour une nouveauté en démat.
2- C’est du Survival Horror pur jus. Et ce style est suffisamment peu représenté pour susciter l’intérêt des amateurs de frissons, qui sauront apprécier les qualités du titre en ayant l’indulgence de détourner le regard quand ils seront nez à nez avec ses défauts.
3- C’est une petite production Française réalisée par Paul Cuisset (anciènement vice-président de Delphine Software). Si ce nom ne vous dit rien, peut être que citer les Moto Racer sur PSX vous parlera plus. Toujours pas? Bon, je sort l'artillerie alors : programeur et scénariste pour le mytique Flash Back! Ca vous va comme CV?
Cet ambitieux personnage a donc réaliser, avec une équipe modeste qui est loin de pouvoir rivaliser avec les poids lourds comme Capcom ou Konami, un jeu riche qui a probablement été victime du buzz qu’a engendré ses nombreux retards ainsi qu’une magnifique Bande Annonce que vous avez pu voir en début d'article.